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Rêverie
Polynésienne |
À
rêver de vous, eaux turquoise et limpides où se reflètent
les silhouettes inclinées de vos graciles cocotiers. Odorantes frondaisons
de vos élégants frangipaniers aux fleurs délicates. Plages
de sable d'or, écrasées de chaleur où, paresseusement, vos
envoûtantes vahinés fleuries laissent bronzer leurs corps alanguis
de déesses. Je me prépare à vous rejoindre et suis préparé
pour le grand voyage
Il
n'est de vision plus mirifique que l'arborescence de vos lagons, bordés
de coraux rouge sang où des myriades de poissons multicolores jouent au
creux de vos récifs et des vagues bercées par les courants du large.
Chant, ô combien mélodieux de leur reflux mêlé au bruissement
des coquillages roulant sur le sable
Demain
me verra heureux d'être auprès de vous, accueillantes îles
sauvages et paradisiaques où, lorsque je vous aurai rejointes, à
vous je m'abandonnerai
Vie de résignation ? Surtout pas, mais, existence
de rêve qui me verra naviguer inlassablement en vos lagunes à bord
de vos pirogues, le front ceint d'une couronne de fleurs de tiaré
La
pêche traditionnelle, la collecte de fruits gorgés de saveurs, seront
mes activités premières afin de vous approvisionner gracieusement
en remerciement de votre chaleureux accueil. Je passerai mes jours à m'extasier
devant vos reliefs verdoyants réfugiés au coeur de votre nature
exubérante grâce aux brumes de chaleur, ainsi que vos côtes
frangées d'écume blanche
Le
soir, au clair de Lune, je savourerai sur le sable de vos rivages enchantés,
votre délicieux Tamara traditionnel et, à l'abri des feuillages
filigranés des filaos complices, nous chanterons en chur les Hyménés
contant vos légendes
Je
m'éblouirai des danses sensuelles de vos gracieuses vahinés, s'offrant
en spectacle, la taille ceinte de paréos bariolés, aux côtés
d'hommes harnachés de plumes et de riches tatouages Maoris, qu'accompagneront
les joueurs d'ukulélés et de toérés... Ô,
somptueux paradis terrestre dont je connais chaque îlot, chaque motu et
d'où s'élèvent vos chants, d'où me parviennent d'enivrantes
exhalaisons, je souhaite ardemment devenir le plus heureux de vos habitants, le
plus fidèle de vos compagnons... C'est ici, près de vos rivages, d'où je contemplerai une dernière fois le ballet silencieux de vos frégates, auprès de Paul Gauguin, peintre talentueux et de Jacques Brel, poète passionné, que je finirai mes jours sans aucun regret d'avoir quitté à jamais ce monde qui se veut moderne, celui des hommes ordinaires... Guy Vigneau |